Jour 26 : de Fjølstadtrøa à Trofors, 351 km

Total 4 556 km

Aujourd’hui, nous sommes pile poil à la moitié du voyage vers le grand nord. 26 jours dans les pattes, et 26 jours à venir, ensemble, non stop, dans notre bubulle à roulettes de 4m2. 26 jours à voir le monde, vivre de jambon et de montagnes, de niveau d’eau à vérifier, de Nutella au petit déjeuner et de café soluble. Ce matin n’échappe à notre nouvelle routine, dans le coffre je reste sous la couette à préparer l’eau, Clément s’oxygène plus vite dehors, les yeux rivés sur son iPhone. Et comme pour tous les réveils, j’en profite pour être lente, avant le grand déménagement du matin. Refaire le lit, ranger les affaires du petit dej’, déplacer les sacs qui dorment devant à l’arrière, et inversement, enlever les protections isolantes de la nuit, réinstaller correctement les bacs de nourriture, déplacer, remettre, re-ranger, devant et derrière. Tout ce petit manège qu’on re-vivra dans l’autre sens ce soir. Ce soir, mais où ? On ne sait pas. C’est bête, c’est long, c’est répétitif, c’est incertain, mais on aime ça.

A mi-parcours du voyage, le niveau des vivres descend tranquillement. Le bougre, il avait raison. Je me revois grogner, au Carrefour belge, le second jour, à trouver disproportionnée la quantité de nourriture en provision pour un espace si petit et à me dire qu’il faudrait de toute façon refaire un vrai grand plein tôt ou tard. Bon, je me suis trompée d’un mois dans mes pronostics. Il reste un mois de périple et encore suffisamment de nourriture en stock. Je regarde la carte et vois le trajet écoulé et le meilleur qui arrive. Clément se projette aux Lofoten. Je suis assez sereine et d’accord avec l’avis du bougre. Ca va le faire !

Comme nous le savions, nous devons avaler les kilomètres durant quelques jours. Il fait plutôt beau alors on en profite pour avancer !

On roule tranquillement et sans problème aujourd’hui, la route est un peu différente. Dans l’après-midi, pour compenser l’autisme grandissant qui nous habite, mon co-pilote préféré lance les podcasts de l’émission « Le temps d’un bivouac » diffusés sur France Inter, qu’il avait pré-enregistrés. A défaut de parler au monde, écoutons le ! On se passionne surtout pour l’un d’eux. Le podcast raconte la vie de Jean-Baptiste Charcot, le gentleman des pôles, explorateur polaire et médecin, qui a navigué à bord de son bateau le « Pourquoi-Pas ? » et décédé en mer. Nous sommes captivés par son histoire et on se voit l’air de rien à découvrir nous aussi de nouveaux horizons. « Vite à bâbord Captain Szmulewicz !!! » m’entends-je crier très naturellement. « Hey moussaillon, voyez-vous la brume au-dessus de ligne de flottaison ? Vite donnez moi une lentille de verre que je puisse focaliser les rayons lumineux qui se reflète dans les vagues ». Fin bref, nous aussi nous naviguons à bord de notre Otago bleu !

Et puis, de retour dans la vraie vie, que voyons-nous soudainement à tribord ? THE étape : l’arche de la région du nord !