Jour 25 : de Averøy à Fjølstadtrøa, 242 km

Total 4 205 km

Au réveil, grosse déception, il pleut toujours ! Mais aujourd’hui plus de filoutage, vaille que vaille, il faut quitter le Lyso Camping et sa machine à laver ! Nous n’avons pas payé hier soir, mais nous sommes des gentils français et allons nous acquitter de notre dette. En bons ermites que nous devenons, nous ne nous attardons pas plus que ça car désormais le nouvel objectif que nous avons en tête est de quitter la partie sud du pays pour rejoindre le rêve de tous photographes et à commencer par celui qui trépigne sur le siège conducteur depuis 1 000 ans : les îles Lofoten.

Réputées pour la magie des lieux, des lumières à couper le souffle, entre montagnes et eaux, les îles Lofoten c’est un peu le graal pour tous voyageurs de Norvège. Il s’agit de notre 2e objectif de voyage. Le premier étant Trolltunga et le 3e étant le Cap Nord ! Autant Trolltunga s’est imposé sur place, autant les îles Lofoten était l’exigence Number one de Clément et le Cap Nord plutôt mon caprice à moi.

A notre grande surprise, on se rend compte que niveau timing, nous ne sommes pas vraiment en dehors des clous. Il nous reste un peu plus de la moitié du voyage, ni en retard, ni en avance, on est bien. Plusieurs randonnées dans les pattes, des paysages déjà époustouflants, la suite s’annonce grandiose, comme une impression que ce voyage monte crescendo.

Mais nous savons que durant quelques jours, il faudra conduire. Le chemin est long avant l’arrivée aux îles, quelques journées doivent être sacrifiées au volant. Que ce pays est vaste et étendu !

Nous voilà donc à quitter les pluies terribles du Lyso Camping direction Trondheim. Nous commençons d’entrée de jeu par un fjord à traverser par en dessous. Aaaaahhhhh un loooooong tunnel de 6km avec 10% de pente, ça m’avait manqué ! Et nous atterrissons de l’autre côté à l’entrée de Kristiansund, ville industrielle, pas très jolie… Quelques sauts de puce d’île en île adoucissent un peu le paysage mais globalement ce n’est pas la meilleure route du voyage.

Des parisiens aux ermites, il n’y a que 4 000 km

Les vacances commencent à prendre un nouveau tournant. Nous avions ressenti un fort besoin d’isolement à Geiranger, quand nous avions été au contact d’autres entités humaines. On ne s’en rend pas forcément compte mais le processus continue ni vu ni connu. Etre en petit comité, voire être seuls, être au calme, devient une nécessité, une dose à avoir dans la journée. Dans notre bubulle, le temps file, au rythme des musiques, des postcasts de France Inter, des photos de Clément et de mes blagues à deux balles. Et ça nous suffit. De mon côté je commence à perdre des repères. Je ne sais plus trop quel jour nous sommes, ni trop l’heure qu’il est. Je commence à me réveiller la nuit et à regarder par la fenêtre pour vérifier où nous sommes garés. Je me dis à moi-même qu’avoir plusieurs buts structurent ce voyage et évitent que l’on se perde complètement avec nous-mêmes !

Il paraît que Trondheim est joli, nous arrivons enfin à 18h30. On note quand même que les jours défilent mais rien ne change dans ce pays : 5h de route pour 242 km ! AAAAAHHH non mais j’aime, j’aime…

Mais bon nous y sommes ! La plaque d’immatriculation est scannée 200 fois pour entrer dans la ville… On pense à Antoine de Freed Home Camper qui va être bien content content de recevoir nos amendes, notifications et autres péages à la norvégienne, en différé de deux mois ! On sait une fois sur trois combien représentent ces sommes, uhmmmmm, on adore, on adore. Nous entrons donc dans la ville et bon. Force est de constater que le sentiment de devenir deux ermites ne fait que croître. Nous sommes moyens contents d’être là. C’est une jolie ville certes mais bon, c’est une ville. Avec des feux, des stops, des gens, des supermarchés, des banques, des passages piétons, partout. Une ville de province bien aménagée.

Trondheim, ou la fuite des deux ermites

Clément recherche une place via Parkfornight et on se retrouve dans un espace parking surbooké de camping-cars près d’un complexe sportif. Uhm. Pas possible. On cherche ailleurs, on repère une place en bord de rivière, à côté de bâtiments. Uhm bof convaincus, on décide d’aller plus loin dans le centre, voir un peu à quoi ça ressemble, marcher un peu, voire peut être boire un verre et qui sait trouver un meilleur lit pour la nuit. Nous traversons la ville, Clem veut jeter un oeil au quartier étudiant avec la grande bibliothèque mais on loupe le passage. Finalement on gare le van dans une rue piétonne trop mignonne, mais on se rend compte que les places de parking de ce quartier sont privées. On hésite. Qu’est ce qu’on fait ? On cherche un bar sympa dans nos guides mais en vrai on n’est pas hyper emballés. Payer 14 euros une bière dans un bar, on a déjà ça à Paris, on ne va rien découvrir de nouveaux. On tente quand même un plan alternatif, dans un pub underground, pour artistes, mais il est fermé… Bon après 1h30 d’hésitations on finit par lever les voiles. Tant pis pour Trondheim, tu as l’air jolie et sympa comme ville étudiante, mais nous n’avons définitivement pas le coeur à ça ! On commence à s’inquiéter de ce processus mais c’est plus fort que nous, tant pis, on file s’isoler.

On quitte donc, pour le plus grand bonheur de notre plaque d’immatriculation encore scannée, l’ambiance grosse cité, quitte à rouler encore. Là on se dit que vraiment on devient asociaux. On ne veut pas ce monde, ce bruit, on connaît tout ça. On repère sur l’application magique un coin en bord de forêt, à l’entrée d’un musée, à une demie heure d’ici, aaaahhhh bah voilà ! Nous quittons tant bien que mal les grandes voies citadines, pour des routes plus petites jusqu’à un chemin. Le coin n’a rien de dingue mais on se sent tellement mieux. Un autre van est là, c’est l’entrée du musée de Fjølstadtrøa, la ville d’ici, mais on ne le voit pas. Il est perdu dans un champs de blé et un bout de forêt. Clément file prendre une photo ou deux de l’espace et moi je me pose un peu, je nous identifie sur Facebook comme étant au musée de Fjolstadtroa, le community manager me le rend bien. Il est temps de couper le téléphone, le GPS, les applications et de respirer la nature, là c’est pas trop le moment !

La soirée sera dédiée à la thématique : comment devient-on des asociaux, misanthropes, ermites ? A partir de quand a-t-on besoin du monde, et à partir de quand n’en-a-t-on plus besoin ? Réflexions en solo et partagées, on en est mi-amusés-mi-inquiets… On verra bien si on arrive à se re-socialiser au monde ! Mais pour le moment qu’importe, nous sommes dans notre phase ermites à deux, ermites heureux !